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LA SAINTE VIERGE MARIE SELON LE CORAN ET L'ISLAM

Maryam, en hébreu et en araméen Miryam. Grammaticalement la terminaison de ce nom indique en araméen une ethnicité.

En langue arabe, la tradition lui donne le sens de dévote, pieuse (abida). Ce sens, qui s’inspire moins de la stricte étymologie que de la vénération que le monde musulman porte à la Vierge, explique l’emploi fréquent de Maryam comme prénom de femme. Vénération profonde, séculaire et combien justifiée, qu’il importe de souligner. Un musulman qui a tant soit peu médité le mystère de la Vierge n’évoque jamais son nom sans être ému, sans éprouver un tendre respect pour celle que Dieu a choisie, purifiée et élue entre toutes les femmes (S.III, 42) et sans être saisi d’une révolte intérieure quand il pense à « l’atroce calomnie » portée blasphématoirement contre la première du monde. C’est que Marie et trois autres femmes illustres : Fatima (fille du Prophète), Khadija (première épouse du Prophète), Asiya (épouse de Pharaon et protectrice de Moïse) sont pour les musulmans des signes de Dieu. (aya), des êtres prédestinés qui leur foi et leur souffrance sont profondément marqué les trois grandes religions révélées : Judaïsme, Christianisme, Islâm.

La Vierge apparaît cependant plus intégrée dans le mystère de l’œuvre de Dieu et plus liée. Son destin, dans le cadre de la volonté divine, est d’être un vecteur entre Dieu et l’humanité, un lien entre la spiritualité chrétienne (compte tenu des réticences protestantes) et la spiritualité musulmane. Pour les musulmans, pour les catholiques et les orthodoxes, elle sera toujours un phare au milieu de la nuit vers lequel se tournent les regards des croyants. Dans le Coran, la sourate 19 "Miryam" lui est totalement dédiée.

N’est-elle pas placée entre deux religions qui la vénèrent avec la même ferveur, et entre les limites extrêmes de deux essences spécifiquement différentes par leur nature et leur possibilités : une essence infinie, sublime, incompréhensible que les hommes sont impuissants, à la lumière de la seule raison, de louer et de glorifier comme il convient – l’essence divine -, et l’essence humaine limitée, imparfaite, corrompue, instable, pétrie d’ingratitude, d’hypocrisie, d’orgueil et portée à la violence et à la perfidie ?

Placée ainsi entre le divin et l’humain, elle demeurera l’éternel support de l’espérance et des déceptions de l’humanité, radieuse au-dessus de tout horizon de vérité, d’amour et d’ultime salut. Sa totale confiance en Dieu et son abandon à sa souveraine volonté ne sont-ils pas précisément le symbole même de ce Tawakkul dont l’Islâm a fait le fondement primordial de sa doctrine, fondement sans lequel la dévotion serait vidée de son contenu et deviendrait une grossière entreprise de « bons placements » pour la vie future.

Aussi est-elle chère aux deux plus grandes religions inspirées du monde : le Christianisme et l’Islâm. Chacune d’elles la vénère avec respect et ferveur, à sa manière. L’Islâm d’aujourd’hui voit en elle l’emblème d’un éternel appel à la réconciliation de tous les croyants autour d’un monothéisme pur, tel qu’Abraham l’a enseigné aux hommes et tel que Muhammad l’a rappelé et défendu, pour qu’à l’unisson chacun puisse dire : Tu solus Dominus, qui tollis peccata mundi miserere nobis, et Gloria deo in saecula saeculorum. Réconciliation qui suppose l’intercompréhension amicale, le renoncement à l’iconophilie et le respect des données de l’histoire et de la raison.

Avant la révolution Algérienne, la Basilique de Notre Dame d’Afrique à Alger, était beaucoup plus fréquentée par des Musulmans que par des Chrétiens.
On peut lire dans sa décoration murale intérieure ces mots qui résument la vénération et le respect en sa faveur par les deux religions.

"NOTRE-DAME D'AFRIQUE PRIEZ POUR NOUS ET POUR LES MUSULMANS"

Marie La Vierge           Basilique de Notre Dame d'Afrique

D’innombrables ouvrages chrétiens, en toute langue, ont été consacrés à la Vierge. Il ne peut en être fait mention ici sans dépasser le cadre de cette note. Renvoyons le lecteur aux sources fondamentales, notamment à ce qui correspond chez les musulmans aux hadiths, c’est- à- dire aux Évangiles (Matt., 1, II, XIII, Luc, I, II, VIII ; Jan, II, XIX) sans oublier les Apocryphes.

La version musulmane concernant la Vierge mérite, même sous une forme très succincte, d’être connue. Elle est née d’une mère nommée HANNA (Anne) et d’un père du nom de Imran (en hébreu Imrâm). Mais là une remarque est à faire, car elle a souvent créé des discussions stériles et des incompréhensions graves entre chrétiens et musulmans. Les mots n’ont pas la même portée dans les langues sémitiques et les langues indo-européennes. En arabe, en hébreu, en araméen, etc., des mots comme ‘ab (père), ‘umm (mère), ‘ukht (sœur), ibn (fils), bint (fille), amm (oncle paternel), n’ont pas une signification limitée aux liens de parenté. Quand on dit de la Vierge « bint Imrân » cela ne veut point dire qu’elle était la fille d’Amrâm, père de Moïse, mais qu’elle était de la lignée. L’exégèse dit bien qu’entre Marie et celui-ci, il y avait mille huit cents ans ! Les commentateurs et les théologiens musulmans affirment d’après le Coran qu’il s’agit en l’occurrence, non d’un lien direct de parenté, mais d’une lignée généalogique et d’une communauté de pensées religieuse. Un auteur comme Ibn Khaldoun qui s’étend longuement sur la généalogie de la Vierge dit : « Il est dit dans la révélation coranique : « Marie, fille d’Imrân ». Mais qu’on sache que le mot Imrân a comme sens en hébreu Yûaquim » (Joachim), ou encore Joachim l’Imranite.

En fait, sur la généalogie de la Vierge, les auteurs musulmans sont mieux informés que les auteurs chrétiens qui tirent leurs renseignements non des Évangiles officiels, mais des Apocryphes. Du moins, les auteurs musulmans fournissent plus de détails sur la question. Des orientalistes de renom ont pu en toute bonne foi le reconnaitre. C’est ainsi que ni le Protevangelium Jacobi, ni le De nativitate Mariae ne donnent la généalogie de sainte Anne, mère de la Vierge, alors que la tradition musulmane en donne une liste édifiante. Selon la même tradition Imrân (Joachim) et HANNA (Sainte Anne) vivaient modestement dans le paisible village de Nâsira (Nazareth). Ils étaient déjà avancés en âge quand un jour, á la vue d’un oiseau qui donnait la becquée à son petit, sur un arbre, Hanna éprouva une tendresse telle qu’elle pria Dieu de lui donner un enfant, promettant de vouer au service du temple le fruit de ses entrailles, si son vœu était exaucé (S.III, 35).

Peu après la mort de son mari, elle donna, par la grâce de Dieu, naissance à une fille dont elle ne pouvait, comme elle l’avait espéré, faire une servante du Temple en vertu de la loi juive réservant le service des offices aux seuls hommes. Malgré les réserves des rabbins et après un signe manifeste de Dieu, son oncle Zakariyyâ put la prendre en charge et exercer sur elle des droits paternels en tant que tel. L’enfant put ainsi grandir dans une dépendance du Temple (S.III, 35,37). Devenu trop vieux et ne pouvant s’en occuper, Zakariyyâ demanda á son neveu Joseph, modeste menuisier (najjâr) et cousin de la Vierge de l’aider de son mieux. En ce même Joseph, chacun voyait son futur fiancé (Khatib) Marie demeura cependant dans le temple qu’elle ne quittait, suivant les prescriptions du Talmud, qu’au moment de ses règles.

Elle y recevait miraculeusement sa nourriture (S.III, 37) Joseph n’est pas mentionné dans le Coran. Où a-t-elle vécu exactement ? A Bethléem, à Jérusalem, à Nazareth ? La tradition musulmane est vague à cet égard et les avis sont assez partagés. Nous fîmes du fils du fils de Maryam, ainsi que de sa mère, un signe. Nous leur donnâmes un asile sur une colline paisible et ruisselante d’eau (S.XXII,50) Ce traite semble indiquer l’antique Nazareth, aujourd’hui en contrebas d’une hauteur, alors qu’autrefois Nazareth surgissait dans sa blancheur sur une élévation nettement dessinée du côté de l’orient, mais peu détachée de la colline de l’ouest et allant du sud au nord jusqu’à la source appelée actuellement source de la Vierge. C’est dans cette attachante cité, toute parfumée de sainteté, même de nos jours, qu’eut lieu l’Annonciation. La tradition de l’Islâm la rapporte ainsi : l’archange Jibril – surnommé Esprit de sainteté – apparut sous la forme d’un jeune homme à la Sainte Vierge, alors qu’elle priait en particulier et lui annonça la naissance d’un fils.

Elle éprouva un vif étonnement, étonnement bien naturel qui milite en faveur de la thèse musulmane sur le rejet de son mariage avec Joseph, car il paraîtrait invraisemblable, humainement parlant, que vivant sous le toit de son fiancé, ou mari, elle ait pu dire : Comment pourrai-je avoir un enfant mâle puisque aucun parmi les hommes ne m’a touchée ? (S.XIX,20).

Une telle annonce fut faite près du puits de Salwán (consolation) où elle se rendait pour puiser de l’eau, à l’instar des femmes du village. L’archange la rassura et lui dit avant de se retirer : « Dieu t’a vraiment choisie, purifiée, élue entre toutes les femmes des mondes. O Marie, dévoue-toi à ton Seigneur, prosterne-toi et incline-toi avec tous ceux qui s’inclinent [devant la volonté souveraine de Dieu] ! (S.XIX,42-43). Et c’est ainsi que Marie qui avait préservé son corps de tout contact humain, conçut miraculeusement Jésus. Miracle moins inadmissible que la création d’Adam à partir d’une terre argileuse (S.III,59). Elle avait son pur et Dieu révèle : « Nous insufflâmes en elle de notre esprit. Elle tint pour vrais les paroles de son Seigneur et ses livres, car elle était du nombre des orantes » (S.LXVI,12).

L’esprit de Dieu pénétra en la Vierge, selon l’exégèse coranique, par « la fente de sa chemise » Il n’est nullement question dans Tabari, au commentaire de la S.LXVI, 12, contrairement à ce qu’écrit Wensinck, dans l’Encycl. Islam, « d’esprit insufflé par la bouche », soit dit en passant (cf. Tab., XXVIII,172). C’est Râz. (XXI, 201) qui envisage cette possibilité parmi d’autres hypothèses. Qui a insufflé ainsi en elle ? Certains commentateurs pensent que c’est l’archange qui en est l’auteur suivant la volonté de Dieu. Mais dans leur grande majorité, ils attribuent cet acte à Dieu.

Après cette annonce, elle se rendit chez une cousine plus âgée, Elisabeth, alors enceinte du futur Jean Baptiste. Trois mois après, elle était de retour en son foyer et Joseph ne tarda pas à s’apercevoir de sa grossesse anormale. Mais un ange l’avertit, au cours d’un rêve, du mystère de cette grossesse. Elle donna naissance, selon la volonté de Dieu, à Jésus (Yashu) qui était un messager de Dieu, que d’autres messagers avaient précédé et Muhammad devait suivre pour clore la liste des envoyés de Dieu.

Le Coran exhorte les chrétiens à renoncer à l’élever jusqu’au niveau de l’essence incréée et créatrice, à le considérer comme un prophète porteur d’un grand message, à adorer un seul Dieu dans une soumission absolue à sa volonté (islâm) et à reconnaître la mission de Mohammad porteur lui aussi d’un grand et dernier message divin confirmant les précédents et marquant la fin de toute révélation. Déifier Jésus apparaît, au regard de l’Islâm, comme une trahison de son message et une chute dans les exagérations les plus dangereuses : « O vous qui avez reçu les Écritures, gardez-vous de toute exagération dans votre religion et ne dites sur Dieu que la vérité. Jésus, Fils de Marie, est seulement l’Apôtre de Dieu, son verbe (Kalima) qu’il transmit à Maryam et un esprit émanant de lui. Croyez donc en Dieu et en ses apôtres et ne dites pas « trois » [hypostases]. Cessez de le dire ! Ce sera mieux pour vous Dieu est seul et unique » (S. IV, 171)

A l’âge de douze ans, Jésus quitta la maison familiale et se rendit à Jérusalem. Sa mère devait le revoir dans le Temple discutant avec les docteurs de la loi, aux noces de Cana, et lors de son apparente crucifixion, sur le Calvaire. Avant d’être rappelé à Dieu. Jésus la confia á son ami et disciple préféré Jean. Elle suivit l’Apôtre jean à Ephèse où, à un âge avancé, elle mourut (selon d’autres sources, elle mourut à Jérusalem.)

Marie, pour les chrétiens, les catholiques en particulier, doit être appelée Mère de Dieu, en raison de l’union hypostatique en Jésus-Christ, son fils, des deux natures, divine et humaine (concile d’Éphèse, 431) Mais Marie, en vertu même de cette maternité, ne pouvait être entachée du péché originel, point capital de la théologie chrétienne. Elle en a été miraculeusement préservée par Dieu, de même qu’elle est demeurée vierge.

Nous nous sommes étendus sur cette présentation à l’intention de nos lecteurs musulmans qui doivent se sentir fiers de reconnaître dogmatiquement la sainteté de la Vierge Marie (Maryam) et de son glorieux fils Isa (Jésus) non pas suivant les données chrétiennes, mais selon les données du Coran et de la tradition de l’Islâm.

BIBLE-CORAN ÉTUDE COMPARATIVE

ÉVANGILE SELON LE CORAN

(1) Pour ces commentaires, nous avons donné la préférence à la traduction du Coran par:
Cheikh Si Hamza Boubakeur (1912-1995) Edition Paris fayard, 1979




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